martes, 25 de septiembre de 2012

Chaleur.



 
On se glisse dans le hamac. Un jour complet dans un hamac. Fermer les yeux et se sentir absorbé. Ouvrir un œil, le refermer. Le cou colle. Le tropique enseigne à tous l’économie du geste. Le cerveau s’englue. Les connexions fondent. La chaleur est une enclume qui repose sur l’estomac. Le soleil effondre.
 
Les mailles du hamac s’enfoncent peu à peu dans la chair. Attendre l’heure suivante qui précèdera la suivante. Le rouleau compresseur passe.
 
Mais l’heure suivante est identique ou pire. Pas de rémission. Alors on espère la fraîcheur de la nuit ou la brise ou la pluie. Ni les unes ni les autres n’arrivent.
 
Les jointures des bras, des cuisses, des genoux suintent.
La pluie qu’on n’attendait plus finalement se prépare. Trois grosses gouttes et puis d’un seul coup des seaux. La rue devient un torrent d’eau chaude. Les enfants sortent et se douchent sous les chéneaux qui dégueulent.
 
L’averse passe. La température n’a pas baissé d’un degré. L’asphalte bout. Les bouffées de chaleur sont encore plus puissantes. On a ouvert le couvercle de la cocotte-minute.
On prie pour que le soleil disparaisse.
 
Et puis d’un coup, il fait nuit. On pourrait croire que quelqu’un a appuyé sur l’interrupteur On/Off. L’ampoule s’est éteinte. Mais la porte du four est restée ouverte.
 
On se traine jusqu’au lit. Les draps exhalent une odeur de sueurs réchauffées. On allume le ventilo. Il pouffe comme un asthmatique, s’élance doucement puis vrombit. C’est encore lui le moins fainéant de tous. Il remue l’air comme il peut de ses petites pales. L’air arrive sur les joues, maintenant on a l’impression qu’on a branché un sèche-cheveux.
Pas un jour, pas une heure, pas une minute de répit. Tout au plus trente secondes quand on ouvre la porte du frigo.
La fatigue est lourde et moite. Passer et repasser la paupière sur l’œil est exténuant. C’est l’effort de la journée.
 
On s’allonge. Chaque millimètre de peau écrase le matelas. Les murs sont lézardés, pelés. La chambre a des allures de débarras ou plutôt de cellule. Les fringues et les serviettes suspendues aux clous, les chaussures en désordre sous les lits. Aucune lumière ne pénètre ici, une pièce borgne. La seule ampoule diffuse une lumière pâle qui s’essouffle et n’atteint même pas les recoins de la pièce.
 
Sur un semblant d’étagère, les rasoirs, les déodorants, les savons sont balancés en vrac. Les rouleaux de papier hygiénique traînent avec les chaussettes en boule.
 
Etendue sur le lit dans une chemise de nuit à fleurs turquoise, cette femme semble une poupée de chiffon couchée dans un dépotoir. On pourrait croire qu’on l'a séquestrée. Mais non, elle est échouée volontaire. Abandonnée.
 
Chaque coup a ajouté une fissure au cristal de son âme. Un coup supplémentaire et elle vole en éclats. Elle préférerait se coucher dans une boîte remplie de copeaux et écrire sur le couvercle le mot FRAGILE en peinture rouge. Elle tremble comme la dernière feuille d’un arbre.
 
Rien de plus.
 

 

 

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