Aujourd’hui, ma mère est montée au ciel.
Non.
Aujourd’hui,
ma mère est morte.
Comme un
poisson sorti de son bocal.
Sa bouche
grande ouverte
Aspire,
Aspire
l’air.
Mais l’air
ne veut plus rentré.
Il en a
marre l’air ?
Il refuse ?
Il a l’air.
Il a l’air
d’avoir l’air
De ne plus
vouloir.
Il se
rebiffe.
Il entre.
Il entre.
Il entre.
Mais il ne
ressort plus.
Ses yeux se
renversent,
Mon poing se
ferme,
Ecrase sa
main,
Et c’est
fini.
Je pleure.
Il circule,
en moi, l’air,
Par la
bouche qui chuinte,
Par le nez.
Et ça fait
des grosses bulles,
Des grosses
bulles d’aérateurs d’aquarium.
Elle plane.
Je vais à la
cabine téléphonique.
Elle me
suit.
J’annonce.
« Allo,
ma mère est morte. »
Elle me
frôle.
Elle m’écoute.
Je retourne
auprès de son écorce.
Je regarde
ses doigts noueux,
L’alliance
enfoncée dans la chair,
Son gros
ventre rempli de plumes,
Comme un
oreiller,
Son front
plissé de soucis,
Le creux des
yeux bleu gris,
Gris bleu,
La pointe
derrière son oreille,
La pointe
derrière mon oreille,
J’effleure,
Marque du
moule,
Moule
familial.
Abandonner.
Maintenant,
La ligne de démarcation
a été franchie.
Il faut
abandonner
Le corps,
Le ranger au
sous-sol,
Dans le
frigo,
Le conserver
au frais jusqu’à la date,
A la date
indiquée,
A la date
limite.
Prendre note
une dernière fois,
Je caresse
Les méandres
de sa peau.
Enregistrer.
Photographier.
Mémoriser.
Intérioriser.
Après la
glace,
Le feu,
Et encore l’impératif,
Ne pas
oublier.
Après le
feu,
L’air,
Et les
cendres répandues,
Dans les
yeux,
Sur la
terre,
Sur la
neige.
Et puis plus
rien.
Rien.
Rien.
Rien.
Ou bien si,
Un détail.
Chaque nuit,
Un souvenir.
Le cliquetis
De son retour,
Une fois le
travail terminé,
Huit heures de
ménage
Et de bons
et loyaux services.
La clé qui
tourne
Dans la serrure
Et dans ma
tête
Et qui
délivre enfin
A quatre
heure et quart
Du matin
Des monstres
de l’avant.
Que vais-je
faire
Maintenant
Des monstres
de l’après ?
Sans ma
mère.
Version originale, 2 octobre 1998.
Version blog
1, mai 2013.
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