À quoi bon écrire. 2.
Ou tout raconter sans savoir comment.
Je suis assise dans mon lit. L’écran bleu de
l’ordi illumine le cuarto. Le chat ne joue pas avec le cordon. Il court comme l’hystérie
et grimpe aux bananiers.
Dehors c’est la Colombie qui parle. Et l’écriture
du roman est une fois de plus remise au lendemain.
Je pourrais m’acheter un paquet de gauloises
et le poser à côté de l’ordi, ça ferait un peu plus durachien. Après le chat et
les gauloises, je pourrais m’acheter aussi une lampe de bureau.
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Aujourd’hui, ma mère est encore morte, une
fois de plus. Dans mes rêves. Et une fois de plus, je devais me charger de son
appartement. À vider, à nettoyer, la panique face au travail. Attention !
Cela fait des mois que les animaux sont seuls, ce doit être un désastre. On
m’avait prévenue. Je marche entre les voitures du parking. Et puis tiens, c’est
bizarre, ils ont transformé les garages en mobil home. Les gens ont vraiment
des idées à la con : qui vient passer des vacances sur un parking à côté
de la gare ? Quelle étroitesse d’esprit ! Et ils ont installé des
beaux meubles. Il faut probablement entrer avec les patins. Quels voisins à la
con ! Je m’approche de l’ascenseur. Putain, bordel ! Mon fiancé n’avance pas. Il a le nez en l’air
au milieu du parking. Putain ! Je ne peux pas faire ma vie avec un type
pareil. Ma mère ne va pas être fière de moi. Et je vais devoir me charger de
tout. Et puis l’ascenseur s’ouvre. Il pleut à l’intérieur. Une sorte de douche-machine
est installée. C’est le début du malestar. On monte, on se sert dans un petit
coin pour ne pas se faire tremper. Je pense que c’est un truc pour les gens
malades. Ca sent déjà l’hôpital. Putain, c’est la catastrophe ! J’ai tout
le poids du monde sur les épaules. Qui peut m’aider, bon dieu, je suis seule.
Et l’ascenseur n’arrive jamais à destination. Il n’y a pas d’arrêt possible,
pas de bouton.
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Elle regarde l’ordi désespérée. Elle passe du
je au elle, du elle au je , sans même sans rendre compte. Que faire de cette
vie, que faire de toutes ces choses gardées ? Ces mots frappés sur un
clavier et qui ne sortiront jamais de cette mémoire. Pourquoi les écrire,
pourquoi les conserver dans un disque dur, pour qui ? …enfermés dans une
boîte, ils restent. Elle n’arrive à
rien.
Sa vie
se résume à : Trois peintures en vrac, des spectacles à peine vus
déjà disparus, des photos laissées pour mortes, un film sans tournage, une
psychanalyse qui ne s’arrête jamais, des mots qui gardent le silence…Pour
qui ? Pour quoi ? Une vie pour rien. Que manque-t-il ? Quel
dommage. Toute une vie devant soi. Et rien. Une vie faite de
faiblesses, ni plus, ni moins. Elle est fatiguée d’être soi. Elle est à l’étroit, étriquée, mon dieu, au secours de
l’air, grandissons nous. Sortons vite de cet ascenseur-douche-hôpital !
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Une petite vie ! Maintenant, elle a
les deux pieds au bord du plongeoir. Et alors quoi ? Elle plonge ou pas.
En bas, la piscine est vide. On voit les mosaïques dégueulasses. Il y a de la mousse,
des dégoulinures et de l’eau croupie. Verte et bleue. C’est inconfortable
d’avoir les doigts de pieds au bord du plongeoir. Sauter pour faire quoi ?
Pour faire mieux ? Ajouter du rouge au fond de la piscine ???
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